La SFEN Bourgogne Franche Comté a invité Jean Jacquinot[1], conseiller scientifique du directeur général du projet ITER, pour une conférence sur ce sujet à l’ESIREM le 30 Mars.

Après la décision de l’implantation d’ITER en France en 2005, le site de Cadarache a été retenu. Par un traité, une collaboration internationale sans équivalent dans l’histoire,  regroupe l’Europe, le Japon, les Etats Unis, la Russie, la Corée du Sud, la Chine et l’Inde. Les motivations sont fortes après la prise de conscience avec la COP 21 des dangers des émissions de CO2 (en particulier à cause de l’utilisation du charbon), qui risquent de provoquer un phénomène d’emballement, les océans ne pouvant plus absorber ce gaz en raison de l’élévation de leur température.

De nombreux pays étudient la fusion en laboratoire. Jean Jacquinot souligne : « ITER est une grande installation pour faire la démonstration scientifique de la technologie de la fusion. Mais son développement ne se fera pas avant la deuxième moitié du siècle »

L’énergie nucléaire provoquée par la fission utilise les éléments les plus lourds, pour la fusion on travaille avec les éléments les plus légers, le deutérium et le tritium qui, à la température de 100 millions de degrés, fusionnent  en dégageant de l’hélium et un neutron. L’hélium, à ces températures extrêmes est ionisé et le deutérium et le tritium suivent les lignes de champ magnétiques, ce qui  permet de les confiner et d’utiliser l’énergie libérée par l’hélium (20% du total) pour maintenir la température du milieu. Le neutron emmène 80% de l’énergie que l’on va récupérer en le ralentissant dans une couverture sur les parois du tore pour chauffer de l’eau et fabriquer de la vapeur comme dans une centrale thermique. Mais ce neutron va aussi activer les structures. Enfin, il va être utilisé pour fabriquer du tritium, en le faisant agir avec du lithium. La ressource est illimitée et il n’y a pas de risque d’emballement.

Le confinement du plasma est assuré par une bobine magnétique centrale et des bobines poloïdales et toroïdales tout autour empêchant ainsi le plasma de toucher les parois métalliques du tore. ITER est dimensionné pour produire 500MW avec un gain de 10. Le projet fera la démonstration de la faisabilité de la fusion et des technologies requises (supraconducteurs, matériaux etc.).

Dans la présentation, les photos des  composants prises sur les lieux de fabrication dans les différents pays permettent d’imaginer l’importance du montage final. Des outils géants capables de manipuler des charges de 1500 T sont fabriqués en Corée. En Italie, en France et au Japon, la fabrication des bobines du champ toroïdal sont en cours. Une fois insérée dans une cassette d’acier, chacune des 18 bobines toroïdales pèsera 310T, l’équivalent  d’un Boeing 747 à pleine charge. La Chine, l’Europe, le Japon, la Corée, la Russie et les Etats Unis sont engagés dans la production de 200km de câbles (2800T) pour une valeur de 610 millions d’€. Une autre vue montre la base du cryostat en fabrication en Inde…

Dès 2002 tous les départements de la région PACA se sont impliqués financièrement pour cette réalisation. Entre le port de FOS et le centre de Cadarache, des routes ont été élargies, certains ponts renforcés, pour assurer le transport des différents composants venant du monde entier[2].

Parmi les nombreuses questions qui ont suivi : « Va-t-on devoir démanteler toutes les centrales à fission ? » Réponse : « Non pas du tout, il faut attendre plusieurs dizaines d’années pour construire le réacteur DEMO. Tout dépend aussi des moyens engagés. La société devra prendre en compte le problème du réchauffement climatique. L’Allemagne sort du nucléaire mais continue ses études sur la fusion. »

Anne-Marie Goube, Présidente WiN Bourgogne

[1] Ancien directeur du JET

[2] vidéo sur l’état du chantier aujourd’hui.http://www.synops-editions.fr/Multi_Iter.html

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