La SFEN et WiN Bourgogne Franche Comté, Sauvons le Climat et l’Association des retraités de Valduc ont invité Jean Poitou[1], physicien, climatologue, pour une conférence[2] au Lycée Carnot de Dijon le jeudi 11 Octobre 2018.

Comme l’a rappelé Jean Poitou, les recherches scientifiques sur le climat remontent au 19ème siècle : Fourier a énoncé que l’atmosphère piège une partie de la chaleur provenant du Soleil. Tyndall a effectué les premières mesures d’absorption des infrarouges par divers gaz ; il a identifié le rôle climatique de la vapeur d’eau : une seule nuit d’été sans vapeur d’eau dans l’air détruirait toutes les plantes gélives. Arrhenius a calculé l’effet d’un doublement du CO2 sur le climat, effet contesté par Knut Angström qui a observé que, dans son expérience, l’absorption des infrarouges dépendait très peu de la concentration du CO2.

Dans une serre, le toit empêche la chaleur de partir par convection. Dans l’atmosphère le processus est différent. : Seulement 10% de la chaleur apportée à la surface par le soleil va repartir directement dans l’espace. Les infrarouges sont absorbés par les gaz à effet de serre. Ceux-ci émettent aussi du rayonnement, de même longueur d’onde (selon les lois de Kirchhoff). Ne pourra partir dans l’espace que celui qui est émis à une altitude telle qu’il n’y ait plus assez de gaz à effet de serre au-dessus de lui pour l’absorber. La quantité de rayonnement émise décroit très rapidement avec la température (loi de Stefan Boltzmann), l’atmosphère, plus froide que la surface, émet moins de rayonnement qu’elle n’en absorbe. Il y a donc piégeage de chaleur dans la basse atmosphère. Si on augmente la quantité de gaz absorbant, pour partir dans l’espace, le rayonnement devra être émis à plus haute altitude donc à plus basse température, et donc avec une plus basse intensité ; émettant moins de chaleur qu’il n’en reçoit, le système se réchauffe. La différence entre l’intensité du flux solaire entrant et l’intensité du flux sortant avant l’établissement de l’équilibre est appelée forçage radiatif du gaz qu’on a ajouté.

A haute altitude, la vapeur d’eau se fait rare (elle s’est condensée avec la baisse de la température), c’est donc le CO2 qui domine l’absorption.

L’effet de serre existe parce que l’atmosphère est épaisse et que la température baisse avec l’altitude.

Les aérosols, particules en suspension dans l’atmosphère, réfléchissent ou absorbent le rayonnement. C’est sur elles que se condense la vapeur d’eau pour former les nuages, qui ont un effet majeur sur le climat. Globalement, l’effet des aérosols est refroidissant : le Pinatubo a produit un refroidissement global d’environ ½ degré pendant 2 ans. Cet effet refroidissant des aérosols tempère partiellement le réchauffement dû à l’effet de serre.

Le forçage naturel reste petit devant le forçage anthropique. Il y a une incertitude majeure sur le couple aérosols-nuages, mais c’est un terme petit par rapport aux gaz à effet de serre. « Ce qui n’est pas très rassurant c’est que les émissions de CO2 ne cessent de s’accroître. De plus ; chaque fois qu’on a introduit une nouvelle source d’énergie fossile, elle s’est ajoutée et non substituée aux autres sources. Qu’en sera-t-il avec le gaz de schiste ? » précise Jean Poitou en conclusion.

Les questions très variées qui ont suivi portaient sur les différentes solutions : Le GIEC préconise de stopper l’utilisation des combustibles fossiles, mais si tout le monde voulait un véhicule électrique on n’a pas assez de cobalt pour les batteries.  La capture du CO2 nécessite beaucoup d’énergie et coûte cher.

Est-ce que les modèles sont fiables ? « On demande aux modèles non pas le temps qu’il fera ici le 11 octobre 2055, mais quelle distribution de temps on pourra avoir dans la région en d’octobre vers les années 2050-2060. Les résultats sont robustes pour les températures, moins pour les précipitations car on ne sait pas ce que vont devenir les nuages. Le GIEC indique toujours le type de confiance qu’on peut avoir dans le résultat » ajoute Jean Poitou.

Anne-Marie Goube

[1] Co auteur avec Pascale Braconnot et Valérie Masson-Delmotte de « Le Climat : la Terre et les Hommes » Edp Sciences

[2] Cette conférence est disponible en audio sur le site : http://sfenbourgogne.fr/conferences/ ainsi que la présentation

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